Ayant participé au convoi humanitaire pour la petite ville de Thala, je vous rapporte mon témoignage le plus innocent.
A commencer par la route, et après une courte bienvenue sur la petite parcelle de l’autoroute Tunis-Béja jusqu’à la sortie vers la ville du Kef, les conditions du voyage se dégradent subitement et sans prévenir, remettant la question des bienfaits de la colonisation au devant de la réflexion.
Ainsi, le paysage se voit menaçant sous nos pieds, resplendissant au niveau de nos yeux et zimbabwéen en vue d’ensemble, c’est dire combien la nature nous prépare au paradoxe mortel qui nous attend à notre destination.
En effet, et après ce pénible trajet, nous arrivons à l’agglomération de Thala qui ne fait ni ville ni village, habillée par sa robe blanche de funérailles, désertée par la police, abandonnée par l’état et presque inhabitée par les humains.
Nous entamons la décharge dans un entrepôt de particulier quand petit à petit des villageois surgissent de toutes les montagnes qui nous entourent et parviennent à nous rejoindre après de longues et douloureuses marches, pieds mouillés jusqu’aux genoux, dans la neige et dans la boue, femmes, vieillards, enfants, et des bébés escaladant les dos de leurs mamans…
Visages pâles, regards troublés et troublants, des fois je les sentais accusateurs, par d’autres moments je les voyais larmoyants, implorant de quoi survivre un jour de plus…Mes larmes n’ont pu que partager leurs chutes…m’envahissant d’une haine dévorante…
Les vivres ont finalement été distribués avec beaucoup de peine et de pression et avec l’aide des braves soldats, en manque d’effectif flagrant et de logistique adéquate, se donnent volontairement la mort pour la survie de ces miraculeux villageois…
Nous restons très loin de satisfaire les besoins qui sont essentiellement des couvertures, matelas, produits alimentaires, médicaments, bougies, vêtements, et surtout un coin bien au chaud…dans votre cœur. Merci.
NB: Un seul et unique interlocuteur pour toutes les régions sinistrées, les centres de stockage sous la gestion de l’armée nationale.
Par Seif Ben Kheder