Il me semble utile, par moments historiques, d’essayer parfois de prendre un peu de distance pour non point le goût de l’écart mais par le coût des fards ou, disons, pour peut-être se détacher un peu de la tragédie trop souvent affaiblissante; y compris pour ceux qui pourraient en soupçonner l’aboutissement; à l’évidence plus ou moins tragique.Les observateurs des débats de la Constituante tunisienne, vite tournés en spectateurs, auront sans doute noté cette pluie assez torrentielle de phrases simples et complexes, courtes et longues et toute cette gamme de propositions relatives, subordonnées ou encore introduites par je ne sais quelles queues ou qui.
Les linguistes y trouveront sans doute une mine de corpus pour tous aspects d’itération, de répétition, de ‘coordinations’ et ne manqueront sans doute pas d’y voir des montagnes – n’exagerons pas, de hautes collines – de concordances mais de ton.
Ces mêmes observateurs-spectateurs- au rythme où va la représentation que trop grècque- ne pourront être au fil des jours et des nuits que lassés par un nombre croissant d’excès que le statut de novice ou, pire, d’nitié, ne justifiera pas.
D’un président qui fait montre de beaucoup de ‘sagesse politique’ sans de temps à autre manquer, comme tout acteur (social?)de réserve à un président de commission qui ne cesse de glisser en président tout court, à des députés qui ne cachent vraiment pas – et c’est selon – leur ‘sérieux’ de tract ou leur aise de paroletout autant que leurs émotions ‘motionnelles’, on n’en finit pas de regarder dans l’étalage.Vive la république! Mais alors, on risque aussi d’éviter la montre et donc de cacher du temps pour gacher de l’espace.
En effet, le pays se mord les aiguilles.Et mordues, celles-ci risqueraient bien de ne tourner qu’en un peu moins rond que plat.
La Tunisie d’hors-constituante- politisée ou non – attend bien davantage de ses ‘mandatés’. Ils ne semblent s’en émouvoir qu’aux ordres des connivences. A défaut de clarté d’alliances durables, les autonomes donnent parfois de la voix, tellement ils sont toujours en quête de son, un peu comme pour avoir compris que finalement leurs ‘colères’ ou leurs ‘ surenchères’ sont par temps de flou plus ou moins rassurantes mais d’abord pour eux-mêmes.
Pour le reste, on ne se soucie presque guère de cette pendule qu’on ne pense aujourd’hui qu’en détail; bref en rarement 3 mn chacun. C’est le fond de la tragédie.
De certains députés sont déjà en cours de saturation d’omniprésence, comme pour rappeler qu’au sein de ces 215 individus très bien assis, rien de neuf ne se lève; y compris quand un rapporteur ou un président re-formule à sa guise des propositions pour n’en retenir- mais dans une rapidité d’esprit touchante (à l’essentiel) que ce qui par simple excès de vitesse lui semble.
Comme tous les temps se donnent toujours à la relativité, il n’est pas inopportun de rappeler que d’un bord l’autre, seuls les absents n’ont pas platement tort.
Il y règne un gris de condoléances. Un gros grain de méfiance, presque par consentement mutuel.
Le langage a toujours eu de cette nature que d’être déplacé.C’en est même une caractéristique de son universalité.
On comprendra encore moins ces interventions trop gentilles en temps de ‘guerre’ et trop agressives en temps de ‘paix d’âme’. Une certaine désarticulation parvient à peine à rompre les récidives textuelles. Et l’on oublie encore que la Tunisie ne se réduit vraiment pas à l’hémicycle. Puis qu’est-ce qu’ont se force à sourire quand on s’en souvient, comme après coup.
Les faits demeurent néanmoins là: une majorité est toujours majoritaire; une minorité une minorité. Cette étape devait donc reproduire mais l’un des bouts les plus évidents de l’Histoire parlementaire: les dits autonomes ne font que rarement la différence; voire n’en font pratiquement qu’en début de spectacle.
Je me demanderai toujours si les hors-constituante n’ont pas encore appris en ces cinq jours davantage que dans les dix mois écoulés: Bardo I fait pression dehors. Cela rapporte et tant mieux certains fruits. Les voix opposantes hors constituante apportent également leur bonne contribution mais CE SONT NEANMOINS LES IN-CONSTITUANTE qui font la loi. Les forces de changement réel n’ont aucun intérêt à se détacher de cette évidence. Leur organisation politique n’est plus de l’ordre d’hier. Elle est de l’ordre du jour, le seul d’ailleurs qui leur reste. Un gouvernement se formera. Quelques ‘prérogatives’ n’ont été que trop difficilement arrachées à l’ETat Nahdha. Mais un début de démocratie est déjà irréversible. C’est au renforcement de cet acquis populaire que l’attention doit être portée et des plus vives. L’ETat n’aura comme au parlement qu’une opposition compromettante car de grands compromis. Les Hors-constituante ont des défis concrets à remonter et les actes devront y compter mille fois plus que la spéculation ou la surenchère idéologique. Face à une situation sociale explosive, un Etat qui promet une lune qu’il ne pourra ni voir ni avoir, à défaut d’expérience étatique et de difficultés économique, la Nahdha et ses alliés feront un Etat qui sera moins de travail que de chamailles. Ces dix mois seront à-priori ceux de la disette économique et de la saturation politicienne. Un grand parti doit naître: le parti qui aura compris que ce peuple veut toujours mieux en économie comme en politique et qu’il a tout fait pour le mériter; y compris en se moquant encore une fois de tous ses agités. La nouvelle parenthèse est déjà ouverte. Elle est encore plus importante, car il n’y sera cette fois question que de vrai terrain politique. Sans l’organisation, les forces de changement réel continueront à parler à mille voix pour n’en avoir aucune. Tunisiens intègres, unissez-vous, politiquement! Ce pays a besoin de ses vrais enfants, comme de ses meilleurs amis, les autres peuples.