La révolution française, libérale de tout poil, n’eut de ses succès – au fond ô combien relatifs au vu de ceux qui les repensent- qu’au bout de 4 gouvernements provisoires. Nous n’en sommes déjà , en Tunisie, qu’à cette troisième composition. Mais pourquoi donc les officiels démissionnent-ils? »
IL est peu sans effet de ne penser d’abord que trop peu des gouvernements transitoires tant ils ne s’inscrivent en théorie comme surtout dans leurs pratiques que dans le passager; j’allais dire l’éphémère! Et pourtant, certaines comparaisons tunisiennes s’imposent: Avec Ghannouchi Ier, le provisoire prévu ne semblait s’attacher qu’à perpétrer le passé sous la tente des ‘liquidations’ requises et la chasse aux preuves. La république encore assez chaude n’avait naïve d’ yeux que sur un avenir qu’elle voulait tellement meilleur au point qu’elle perdait presque de vue son alors-présent. Ghannouchi de Bien bien Ben Ali rangeait des affaires et en arrangeait d’autres; ministres opportunistes et de circonstances aidant.
Avec son ex-il-lance Essebsi des années de tout pouvoir; le provisoire se voulait ou tout durable ou trop bref; faute de vérité. On empruntait autant de sous que de formules. Et vinrent écourtées les élections. Ce provisoire d’alors n’était au fond que confirmation d’un passé encore plus lointain dans la conscience grignotée et que forcément collective. C’était au mauvais bout du compte un gouvernement de mille nuages et de bien d’atteintes à l’espoir que faisait naître une révolution des plus grandes que l’humanité ait connues. Et quand de tous provisoires les élections apportèrent un gouvernement de forme autre; le temps glissait déjà dans son ensemble dans la provision. Rien ou peu ne se détachait du passé; jusqu’au fond même de la nature du discours et de l’abjection étoffée de promesses.Le paradoxe était ou est encore que le passé concret n’avait d’œil que sur un avenir qui ne l’était qu’à la mesure des récurrences verbales. A un peuple assoiffé de liberté et de justice, on ne fera jamais mieux pour n’y rien faire que d’en faire semblant. Parle-en, parle-en, il en restera toujours quelque chose, semblait-on ne faire que se dire. Au bout de ces chevauchées politiques, on en est presque à croire que le temps surmonte ses frontières. Un chaos socio-économique sans précédent s’empare d’une société aux ambitions reportées. La politique quasi-éternellement politicienne dévore à coups de pensées édentées et de spectacles ‘ idéologisés ‘ une société où ne dure en premier que l’attente. On annonce des élections mais on n’en fixe de délais que dans l’expansion. On gère la scène à déplaire aux spectateurs en tout acte. Et bien entendu, à trois gouvernements provisoires s’ajoutent comme de nature forcée trois présidences que la durée ne semble qu’unir contraints dans les tournures des spectacles et de l’effritement continu de la crédibilité mondaine; voire civile.
Et encore, comme il se peut toujours qu’un président, bon train, en cache un autre, le plus diligent en aura, de chemin comme de festin, deux.
Fallait-il penser qu’il fallait, pour un État voulu ou annoncé provisoire, autant de conseillers et de ministres et au point que ceux qui, plus ou moins nombreux, démissionneront ne compteront qu’aux marges?! A compter les ministres depuis le 14 Janvier, on pourra presque en exporter à qui de besoin, si acquéreur il y en aura.
Le provisoire semble n’avoir de tête que pour la durée. Et quel paradoxe; encore plus visible en politique quand la morale est purement étatique de raison.
Ainsi, l’État se forge des issues que ne traduiront claires et nettes que les derniers bouts de la provision quant tout aurait annoncé que les jeux sont faits.
La question néanmoins persiste: Pourquoi les ministres du IIIème gouvernement provisoire démissionnent-ils? Ou sont-ils de fait démis?
Il n’y a en principe de révolution qui tombe si vite dans la désillusion! Ces ministres pensent effectivement par leur vécu officiel. Et qu’il n’y ait encore quelque contradiction à croire qu’ils se découvrent le mieux dans la pratique du néant. Il me tente cette impression que l’homme politique n’a de visée, à défaut de pression populaire, que personnelle. Alors, il y va encore pour eux de ce futur proche qu’ils ne s’imaginent que le leur; à se donner à quelque résistance intestine ou à s’afficher différents. M. Marzougui eut ce tort d’hésiter moins à la sortie qu’à l’entrée. Combien, pourtant, aurait-il gagné à se soustraire à cette tentation présidentielle en claquant, pour une première fois dans l’histoire visible, la porte du palais. Il n’en ressortira donc que terriblement minoritaire; déjà que M. Abbou comme M. Dimassi et avant eux M. Ayadi ont jugé court le temps de reprendre le bâton moins houleux du parti ou carrément d’un autre. Ceux qui croyaient davantage au caractère cru provisoire du gouvernement et de l’État dans son ensemble n’avaient eu de tort que celui de n’avoir rien fait en dehors de celui-ci; tiraillés qu’ils ne peuvent qu’être entre la possibilité de gouverner un jour et la grande hypothèse de ne pouvoir jamais avoir quelque chance de le faire. Il n’y a, en politique outrageuse que M. Akermi pour nier en public ce qu’il ne cesse de vouloir en mi-secret: gouverner. Il en est aujourd’hui des moins probables; expérience oblige et dés jetés.
Au fond, rien en Tunisie d’après 14-1 n’a été aussi provisoire que ces ministres, un peu pour crier deux choses: ou que la Nahdha – ce qui semble être vraiment le cas – ne se veut que pouvoir absolu tant par les ‘intrus’ qui restent que par ceux qui d’entre eux partent, ou que la révolution n’a été que des moins vertes. Certes, on reconnaîtra toujours à ce peuple la grandeur de sa patience comme de sa dynamique mais encore faut-il reconnaître à ces gouvernements cette invraisemblable vitesse à pouvoir faire d’un rêve national une galère de parti.
ET, pardon, bien d’autres ne croient la politique qu’investissement à but lucratif!
La logique révolutionnaire en est tout simplement l’antithèse; le contraire de l’avortement social et des fausses- couches politiques.