Le parfait intégriste façon Ghannouchi R. ne pense jamais et ne dit jamais les choses par lui-même. Le discours de l’intégriste sur la parole vraie: Moi je n’ai jamais rien dit ! Comment voulez-vous que je dise des choses que je suis incapable de penser par moi-même ? Moi je rapporte toujours des choses que je n’ai jamais entendues de mes propres oreilles bouchées comme mon esprit de la bouche de celui qu’on dit qu’il en est l’auteur ou de celle qui les a authentifiées sans que leur authenticité n’aient été validées par leur auteur prétendument originel. Chez moi c’est sacré, Dieu a toujours dit et nul ne doit en douter sous peine d’être frappé par sa malédiction, même si personne ne l’a jamais entendu s’exprimer celui-là, sauf ceux qui prétendent sans apporter la preuve qu’il leur a parlé pour leur révéler des secrets dans une langue sémitique comme par hasard, ni le swahili, ni le sanscrit, ni le perse, ni le mandarin, et qui est comme par miracle divin la langue maternelle des peuples qui se disputent sa paternité en l’occurrence les arabes bédouins au caractère aride et leurs ennemis jurés les hébreux, ce qui indique que Dieu est raciste. J’aurais voulu qu’il leur parle en bambara ou en peule et que ses élus soient maoris ou toucouleurs. Dieu a donc dit que c’est moi votre Dieu et vous êtes tenus à y croire sinon ma colère s’abattra sur vous comme le feu de l’enfer qui consumera vos corps le jour du Jugement dernier.
Il est inutile de préciser que la date n’est toujours pas fixée. Elle est laissée à sa libre appréciation. Mais on connaît le programme des réjouissances et des festivités pour les uns et les supplices et les tourments pour les autres. Un peu comme Hitler et ses grands rêves pour son peuple et le cauchemar et les camps de la mort pour les autres. Dieu a dit: toi qui crois en moi tu es béni et lui l’insolent, l’incrédule est maudit. Dieu a ainsi dit: l’enfer c’est l’autre. Comme tout doit rester figé chez l’intégriste, la parole doit l’être aussi. Une parole portée par des émissaires-élus triés sur le volet et toujours choisis en fonction des critères ethniques bien ciblés. Aussi, l’intégriste se doit de les prendre à la lettre et les rapporter comme s’il avait été témoin auditif malgré son handicap en la matière. Il est atteint de graves troubles de surdité. L’intégriste s’auto-persuade qu’il les a eux aussi entendu lui dire les choses. Convaincu qu’il est, il dit: le représentant de Dieu a dit et transmet fidèlement tout ce que Dieu lui a dit. Curieusement, tous les porte-parole désignés par Dieu sont entourés de laudateurs zélés, béatifiés, vénérés et sacralisés ce que l’on peut appeler le premier cercle de privilégiés qui n’ont jamais en réalité été témoins de rien, ni auditifs ni oculaires, et qui ne font que relayer ce qui ressemblerait à des Gourous. Affublés eux aussi d’attributs vertueux pour donner plus de véracité à la parole rapportée, celle que leurs grands maîtres leur ont soufflée à l’oreille et pour certains ce qu’il leur avait gravé sur le marbre de leur poitrine via un Ange descendu du ciel, la poitrine faisait office de feuille blanche sur laquelle Dieu avait pu inscrire tout ce qu’il m’a été dit aux dires de l’intégriste. A une certaine époque la poitrine humaine était une sorte de papyrus, le papier n’existait pas ni le papyrus qui leur était inconnu, et un disque dur à la mémoire infinie, infaillible et « inamovible », éternelle et c’est moi qui vous le dis à vous, dit l’intégriste. Ne me demandez pas pourquoi toutes ces choses-là n’ont jamais été validées par leurs émetteurs d’origine. L’intégrisme pour fonctionner a besoin de sacraliser tout ce que l’on dit. Ne jamais dire les choses par soi. Astucieux, l’intégriste s’érige aussi en rapporteur de la parole sacrée. Même ce qui n’est pas sacré tant qu’il a été dit par celui qu’on a drapé dans les habits du sacré devient aussi sacré. Même si des siècles après quelqu’un les rapporte, il peut devenir leur source-suprême parce qu’il les a authentifiées sans apporter la preuve formelle de leur véracité. Même les choses jamais dites sont dites tant qu’on les attribue à celui qui les aurait dites. Ni déformation, ni falsification, ni mensonge, tout ce que je vous rapporte a été dit, la chaîne se poursuit. Et s’il y a un maillon manquant on revient à la source et on en confectionne un nouveau en disant que ça été dit. Dans la doctrine de l’esbroufe et la culture du vent: on ne dit jamais: je n’ai rien compris, on dit je vous dis ce que trucmuche a dit. On ne comprend jamais rien parce qu’on ne pense à rien et gare à celui qui pense hors du cadre que le gourou a fixé, il est voué aux feux de l’enfer. Si vous voulez mériter des faveurs de celui qu’on vous a dit qu’il est au-dessus de vous, dites toujours Dieu a dit, son messie a dit, son prophète a dit, ses apôtres ont dit, ses compagnons ont dit, sacralisez toujours ceux qui ont servi de transmetteurs de la parole sacrée et vous aurez ainsi la paix.